La guerre économique que mène les américains notamment contre la France n’est pas une nouveauté.
Et pourtant, le réveil politique français n’a toujours pas eu lieu.
Au contraire, vendredi 29 octobre 2021 à l’occasion du G20 en Italie, Emmanuel Macron s’est soumis à une mise en scène de réconciliation entre la France et les Etats Unis, et ce, alors même que la France n’a aucun intérêt à adopter une telle posture. La simple reconnaissance de sa maladresse par Joe Biden a semblé suffire à réchauffer les relations entre les deux pays.
QUESTION: DEVRAIT-ON ÉTENDRE LES MISSIONS DU MINISTÈRE DES ARMÉES ?
Quels sont ceux qui, parmi les femmes et les hommes qui prétendent disposer des capacités intellectuelles, du sens politique et de la force de caractère pour diriger la France, seraient prêts à élargir les missions du ministère des armées, pour y intégrer la mise en œuvre de stratégies offensives.
Que le lecteur se rassure, il ne s’agit pas d’offensives militaires armées, mais d’offensives informationnelles par le contenu et pas seulement par le contenant, cognitives, culturelles, politiques, épistémologiques et juridiques dont le seul but devrait être l’accroissement de l’indépendance et de la puissance françaises.
La mise en musique de cette politique « offensive », utilisant notamment les techniques d’encerclement cognitif et de contre-encerclement cognitif, pourrait s’inspirer du concept des trois guerres et de Front Uni (1). Il conviendrait bien évidemment d’y insérer de la finesse, de la créativité, et d’y ajouter d’autres types de guerres parfois sécrètes, hors champs de bataille, que nous pourrions mener contre ceux qui depuis des décennies nous font la guerre économique, juridique, culturelle, technologique…
Pour s’en convaincre, voici, un exemple :
ASLTOM : UN RENONCEMENT A LA FRANÇAISE
« Alstom » : Rien que l’évocation de cette ancienne pépite de l’industrie française devrait faire pleurer nos compatriotes.
Les faits sont relativement simples, mais noyés dans une masse informationnelle qui a pour effet d’étouffer la colère que cette affaire devrait susciter.
Entre 2002 et 2010, la société Alstom a versé des pots-de-vin dans différents pays, notamment en Indonésie, aux fins d’obtenir des marchés.
Selon le DOJ[2] (le département américain de la justice) le montant de la corruption se serait élevé à 75 millions de dollars pour l’obtention de marchés représentant 4 milliards de dollars.
L’ENCHAÎNEMENT DES FAITS
ACTE I
Le 14 avril 2013, l’avion de M. Pierucci, cadre dirigeant du groupe Alstom, atterrit à l’aéroport J.F. Kennedy depuis Singapour. Il est immédiatement arrêté sans même être informé du motif de son arrestation.[3]
Plus tard, le DOJ lui exposera les faits reprochés. Deux options lui seront alors proposées :
- Un procès devant un Jury de citoyens américains peu enclin à la clémence à l’égard d’auteurs de corruption active. Le DOJ insistera sur le fait qu’un tel procès se traduirait par plusieurs années d’emprisonnement ;
- L’admission de sa culpabilité avec pour effet la possibilité de sortir de prison au bout de 4 mois.
Finalement, Monsieur Pierucci optera pour la deuxième. Il sera licencié par Alstom le 20 septembre 2013. Il effectuera malgré tout une peine de deux années de prison.[4]
ACTE II
Les autorités américaines infligeront à la société Alstom, une amende de 772,30 millions de dollars[5].
Mais comme si cela ne suffisait pas, la France, à travers Alstom, subira une double peine.
Exception faite des idiots utiles ou des personnes coupables d’intelligence contre l’état français auquel fait référence l’article 411-5 du code pénal, nul se sera assez naïf pour admettre que derrière l’apparence d’une intention louable qui serait la lutte contre la corruption, l’Etat Américain n’avait pas décidé à l’avance d’instrumentaliser sa propre justice avec l’avide volonté de satisfaire la volonté de puissance des Etats Unis et son instinct de prédation par le truchement de la société General Electric.
ACTE III
La suite, le lecteur la connait. General Electric (GE) se fera livrer par l’Etat Français le pôle Energie d’Alstom. Frédéric Pierucci sera libéré sous caution par les autorités américaines la semaine pendant laquelle le gouvernement français acceptera le rachat.
A ce stade, un lecteur perspicace devrait se poser la question suivante :
QUESTION : POURQUOI, L’HISTOIRE NE S’EST-ELLE PAS ARRÊTÉE À L’ACTE II ?
La réponse n’est peut-être pas aussi complexe.
Monsieur PIERUCCI ayant été enfermé, le patron d’Alstom de l’époque ne pouvait pas ne pas craindre que la justice Américaine Arbitraire, faisant fi des procédures de coopération judiciaire internationale, puisse remonter du Patron de la branche « Chaudières » vers le n°1.
Comme l’expose correctement le rapport de l’Assemblée Nationale du 26 juin 2019 qui traite de problème de la prolifération des lois extraterritoriales américaines, « Depuis la fin des années 90, les États-Unis ont initié un mouvement croissant d’édiction de normes à portée extraterritoriale, qui s’appliquent à des non-résidents et non-nationaux pour des actions n’ayant aucun lien de rattachement à leur territoire, ou un lien de rattachement extrêmement faible au regard du droit international public. »[6]
Que le n°1 d’Alstom, ait pu se sentir menacé est vraisemblable. Un voyage d’affaire en dehors du territoire français, une arrestation puis une extradition vers les Etats Unis constituait un scénario non seulement envisageable mais fortement probable.
De manière consciente ou inconsciente, l’instinct de préservation est souvent déterminant. Ainsi, la conscience du risque de subir le même sort que son cadre dirigeant, amènera peut-être le Président d’Alstom à négocier la vente d’un instrument de puissance Français à son concurrent GE (General Electric), sans même, semble-t-il, en avoir averti au préalable le gouvernement français.
RENONCEMENT ET DÉSOLATION
La suite ne fut que renoncement. François Hollande et son premier ministre capitulèrent sans contre-attaquer, sans mobiliser les services de l’états et notamment la DGSE, sans chercher à utiliser toutes les méthodes possibles pour conserver un instrument de puissance.
Ainsi ils s’abaissèrent à formaliser cet abandon de puissance sous le contrôle d’un ministre dont l’idée de démissionner ne semble pas lui avoir effleuré l’esprit.
Finalement, les représentants légaux de la France se sont inclinés, pris au piège d’un entre soi détestable, face à une volonté de préserver les siens plus forte que la volonté de poursuivre l’intérêt supérieur de la Nation.
Aujourd’hui, il existe des solutions pour éviter que ce Fiasco national ne se reproduise, on en trouve certaines, parfois peu vigoureuses, dans le rapport de l’Assemblée Nationale intitulé « Rétablir la souveraineté de la France et de l’Europe et protéger nos entreprises des lois et mesures à portée extraterritoriale ».
Mais revenons sur la question du lien de causalité entre le vente d’Alstom Energie et l’enquête américaine pour corruption.
Patrick KRON, le 1er avril 2015, qui fut Président du Groupe Alstom depuis le 11 mars 2003, il s’exprimera en ces termes :
« Il n’existe aucune relation entre la recherche et la concrétisation d’unn accord avec GE et les enquêtes alors en cours devant la justice américaine… »
Le 4 avril 2018 devant la commission d’enquête parlementaire, il maintiendra cette position :
« Non, non, non, nous n’avons absolument pas fait cette opération pour répondre à une pression directe sur moi-même ou je ne sais qui, ou pour des pressions économiques. »
Pendant son audition, le Député M. Bruno Duvergé s’exprimera ainsi : « J’ai donc beaucoup de mal à comprendre comment M. Pierucci est le seul coupable dans cette affaire. »
Quant à Emmanuel Macron, le 11 mars 2015, devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron il tenait ces propos :
« A titre personnel, j’étais moi-même persuadé du lien de cause à effet entre cette enquête [de la justice américaine] et la décision de M. Kron. », tout en rappelant qu’il ne disposait d’aucune preuve.
Dans le même temps, il se fixera comme chantier « de mieux protéger nos entreprises, qu’il s’agisse du secret des affaires ou de leur protection légale ».
A ce jour, 6 ans après cette audition et plus de deux ans après le dépôt du rapport sur le problème des lois extraterritoriales qui menacent les entreprises françaises, même en l’absence de rattachement possible avec les Etats Unis, si ce n’est l’usage du dollar comme monnaie d’échange, la loi n°68-678 du 26 juillet 1968 n’a toujours pas été renforcée et aucun organe centralisateur compétent n’a été mis en place.
En conclusion, la mise en œuvre de mécanismes de défense et d’attaque visant à protéger et promouvoir les entreprises françaises ne doit plus tarder.
En la matière un véritable changement de paradigme est nécessaire. Malheureusement, le Mindset de nos dirigeants est un système défensif dénué de toute créativité offensive, seule génératrice d’accroissement de puissance.
[1] https://www.irsem.fr/rapport.html
[3] https://www.dauphine-strategie-defense.com/publications/2020/10/16/confrence-dsd-reoit-frdric-pierucci-le-pige-amricain
[5] https://www.ledevoir.com/economie/427457/corruption-une-amende-record-pour-alstom
[6] https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/194000532.pdf
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