SERIE ORIGINALE : LE NAZAREEN POURRAIT VOUS DIRE CELA (EPISODE III)

Chères lectrices, chers lecteurs, voici une nouvelle série de textes originaux intitulée : « Le Nazaréen pourrait vous dire cela.

Il s’agit d’une production littéraire dont le procédé est audacieux et original.

C’est en tentant de m’imprégner de l’enseignement de Jésus, sans considération pour les dogmes, que j’ai conçu cette série qui met en scène un Jésus sans concession qui produit un discours rude et parfois tranchant, dont il appartiendra au lecteur de décider s’il pourrait avoir pour émetteur, cet homme qui fréquentait les gens de mauvaise vie et qui un jour déclara :

« Laissez les morts ensevelir leurs morts »

Les sources utilisées par l’auteur pour tenter de cerner la personnalité et l’enseignement de Jésus se résument aux quatre évangiles et aux trois livres suivants :

Amazon.fr – Vie et destin de Jésus de Nazareth – Marguerat, Daniel – Livres

Amazon.fr – L’enseignement de Ieschoua de Nazareth – Claude Tresmontant – Livres

Vie de Jésus – Ernest Renan – Achat Livre | fnac

EPISODE III : AUX ADEPTES DES RITUELS DE L’ISLAM : SUR LA DETECTION DES VERSETS DE CIRCONSTANCE

Amen ! Que ceux qui ont des oreilles pour entendre entendent ! C’est à tort que les gardiens du dogme ne cessent d’asséner que « ceux qui croient en une partie du Coran et rejettent le reste méritent l’ignominie dans cette vie et le plus dur châtiment, au jour de la résurrection »[1].

Au contraire, je vous le dis ! Il sera tenu rigueur à l’homme de la durée présente[2] qui, par l’usage de sa raison associée à l’Esprit saint, est en mesure de détecter les versets dictés par les circonstances d’une époque révolue, mais persiste à les considérer comme des vérités éternelles et immuables[3].

Comprenez ! Certaines sourates comportent des erreurs que l’omniscient, le Tout-Puissant, ne peut commettre.

Il est un verset qui affirme qu’Allah « apprit à Adam le nom des choses et de tous les êtres »[4]. Allah, l’omniscient, serait-il ignorant des sciences ? Pourrait-il ignorer que le lien qui unit la chose et le nom est purement conventionnel[5] ? N’est-ce pas l’offenser, l’infantiliser, que lui prêter l’idée enfantine que la chose contiendrait le nom ?

Je vous le dis, vos anciens, en se laissant guider par la vengeance et la colère, érigèrent à tort des versets de circonstance en vérités éternelles, et ce fut là une erreur monstrueuse. N’est-il pas écrit : « Que périssent les deux mains de l’ennemi, Abu Lahab, et que lui-même périsse ! »[6] ? Alors, apprenez donc à distinguer l’incantation d’un homme en colère d’une parole inspirée ! Et abstenez-vous d’instituer la vengeance en principe éternel et immuable !

Amen ! Cette invocation fut la parole d’un homme, car votre Seigneur vous a ordonné d’aimer vos ennemis et de faire le bien de ceux qui vous haïssent.

Comprenez ! C’est à raison que la tradition ne tira aucune doctrine de certains versets accablants, manifestement caducs ! C’est à raison que les commentateurs s’empêchèrent de voir dans la justification coranique du massacre des mâles de la tribu juive des banu Qurayza[7] une quelconque loi divine valable pour l’éternité.

Comprenez ! Les versets justifiant les combats et les exactions passés ne sont que des versets de circonstance, des témoignages d’un passé révolu, car Allah n’insuffla à Muhammad que le but à atteindre, lui laissant le choix des paroles et des actes pour exécuter sa mission[8].

Je vous le dis, certains de vos versets ne sont parfois que le reflet de concessions à des coutumes archaïques que Muhammad, par réalisme politique, dut se résigner à consentir.

Amen ! Ce fut là son génie. Et c’est à tort que de simples concessions politiques furent considérées parfois comme la légitimation de vieilles coutumes en réalité exécrées par Yahvé, car bon nombre de coutumes figées dans vos versets font horreur à notre Seigneur. Jamais Allah n’ordonna « de couper leur main aux voleurs »[9]. Comprenez donc ! Ce verset fut créé par l’esprit de l’homme en considération de la rudesse des mœurs du peuple arabe.

Comprenez bien ! Lorsque Muhammad rappela que « quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur Terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes »[10], il ne fit que reprendre un commandement de circonstance adapté à l’esprit des hommes de son temps.

Entendez donc ! Tuer une personne coupable du meurtre le plus horrible est une abomination, car il ne vous est pas permis de vous emparer de la moindre vie humaine, puisque la vie de l’homme n’appartient qu’à Allah.

Amen ! Je vous le dis, il existe des lois divines, éternelles et immuables, mais peu nombreux sont les hommes de la durée présente capables de les recevoir. Car lorsqu’il vous est prescrit de « ne pas vous contenter d’aimer ceux qui vous aiment mais d’aimer aussi vos ennemis », vous n’entendez pas.

Encore une fois ! Apprenez donc à vouloir le bien de ceux qui vous haïssent et de ceux qui vous maudissent. Soumettez-vous à ce commandement d’Allah, car il vaut abrogation[11] de tous les versets qui disposent autrement.

Amen ! Je vous le dis, bon nombre de versets porteurs d’une législation archaïque ont prospéré en raison de la dureté du cœur des anciens et de leurs mœurs détestables. Car ce peuple qui mutilait les cadavres[12], chérissait la vengeance, assassinait les filles, n’était pas en mesure de recevoir la pure parole de Dieu.

Que votre esprit fasse donc preuve de sagacité ! Si Muhammad avait délivré aux Qurayshites les véritables lois divines, il aurait péri dès les premiers temps de sa prédication[13].

Comprenez ! Notre Seigneur, l’omniscient et l’omnipotent, après avoir inspiré à Muhammad le but à atteindre, lui conféra une totale liberté de moyens, le laissant juge des capacités de réception de son propre peuple.

Je vous le dis, celui d’entre vous qui, grâce à l’exercice de sa raison bien maniée associée à l’Esprit saint, est capable de distinguer les versets de circonstance[14] des vérités éternelles et immuables, est une bénédiction pour ses proches et une délectation pour Notre-Seigneur.


[1]. Sourate 2v85 : « Croyez-vous donc en une partie du Livre et rejetez-vous le reste ? Ceux d’entre vous qui agissent de la sorte ne méritent que l’ignominie dans cette vie, et au Jour de la Résurrection, ils seront refoulés au plus dur châtiment, et Allah n’est pas inattentif à ce que vous faites. »

[2]. Le terme « durée présente » est une proposition de traduction au plus près de l’hébreu de Claude Tresmontant.

[3]. Il s’agit, selon l’auteur, d’un avatar de l’effet Forest Gump qu’il définit ainsi : « Action consistant à attribuer à une parole de circonstance un caractère immuable et éternellement signifiant apte à produire des effets jamais envisagés ou désirés par le locuteur desdites paroles ».

[4]. Sourate 2v31.

[5]. Ferdinand de Saussure a démontré que le lien qui unit le nom et la chose est purement conventionnel. Penser que la chose contiendrait son nom est la caractéristique du nominalisme enfantin selon Jean Piaget.

[6]. Sourate 111v1 : Cette sourate témoigne d’une volonté de vengeance non contrôlée, qui est le contraire d’une sagesse humaine. En admettant que ce verset reflète un sentiment d’Allah, cela signifierait qu’Allah ne se satisfait pas du châtiment dans l’au-delà, mais réclame une vengeance sur Terre. Dans la révélation coranique, Abû Lahab, l’oncle paternel de Mohammed, est maudit.

[7]. La tradition islamique ne confère heureusement pas valeur d’enseignement à cet événement dont il est fait abondamment mention dans la tradition et que le Coran évoque à plusieurs endroits (Coran 33v26-27).

[8]. Cette interprétation personnelle de l’auteur est la seule selon lui qui permet de ne pas entacher Dieu des actes commis librement par Mohammed, puisque seul le but à atteindre, à savoir l’adhésion du peuple arabe à un monothéisme strict, aurait été soufflé à Mohammed.

[9]. Sourate 5v38 : « Le voleur et la voleuse, à tous deux coupez la main en punition de ce qu’ils se sont acquis, et comme châtiment de la part d’Allah. Allah est Puissant et Sage. »

[10]. Sourate 5v32 : « C’est pourquoi Nous avons prescrit pour les Enfants d’Israël que quiconque tuerait une personne non coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre, c’est comme s’il avait tué tous les hommes. Et quiconque lui fait don de la vie, c’est comme s’il faisait don de la vie à tous les hommes… ». En effet, il résulte de ce verset qu’il est permis de tuer une personne coupable d’un meurtre ou d’une corruption sur la terre. Le verset suivant prévoit des peines cruelles pour ceux qui sèment « la corruption sur la terre » […] « Qu’ils soient tués, ou crucifiés, ou que soient coupées leur main et leur jambe opposées, ou qu’ils soient expulsés du pays ».

[11]. Référence à la technique de l’abrogation qui fut utilisée pour résoudre les multiples contradictions contenues dans le Coran. Aujourd’hui, la réticence des autorités religieuses à déclarer la caducité des versets légiférant cruels ou archaïques paraît donc difficilement justifiable, puisque cela a été pratiqué dans le passé de manière plus radicale. Plusieurs sourates viennent justifier cette pratique : Sourate 16v101 : « Quand Nous remplaçons un verset par un autre – et Allah sait mieux ce qu’Il fait descendre – ils disent : “Tu n’es qu’un menteur”. Mais la plupart d’entre eux ne savent pas. » Sourate 87v6-7 : « Nous te ferons réciter (le Coran), de sorte que tu n’oublieras que ce qu’Allah veut. »

Sourate 22v52 : « Nous n’avons envoyé, avant toi, ni messager ni prophète qui n’ait récité (Ce qui lui a été révélé) sans que le Diable n’ait essayé d’intervenir [pour semer le doute dans le cœur des gens au sujet] de sa récitation. Dieu abroge ce que le Diable suggère, et Dieu renforce Ses versets. Dieu est Omniscient et Sage. » Selon François Déroche, professeur au collège de France, « un unique verset dit du glaive » est réputé avoir annulé 124 autres plus anciens et coexiste dans le Coran avec ces versets abrogés dont le fameux verset « Nulle contrainte en religion » (François Déroche, Le Coran, P.U.F.).

Selon Olivier Hanne « la critique interne du texte en rapport avec le contexte califal montra aussi que les abrogations de versets répondaient utilement aux nécessités conjoncturelles des successeurs de Mohammed » (Olivier Hanne. « Le Coran à l’épreuve de la critique historico-philologique ». « Écueils de l’hypercritique, impasses de la littéralité. L’hypercritique et le littéralisme dans la démarche historienne », Madalina Vartejanu-Joubert, mar. 2012, La Roche-sur-Yon, France, ffhalshs-01461158).

[12]. Par exemple, Hind Bint Ubta Ibn Rabi’ah demande à ce qu’on lui rapporte le foie de Hamza, oncle et compagnon de Mohammed, afin qu’elle puisse le manger.

[13]. Les Qurayshites n’exécuteront pas Mohammed, mais l’expulseront, comme l’atteste le verset 13 de la sourate 13 qui déclare « Combien avons-nous anéanti de localités plus puissantes que la tienne qui t’a expulsé ! ».

[14]. Certains passages de la bible hébraïque et de l’Évangile laissent entendre que des lois pourtant inscrites dans la Torah seraient des lois imparfaites :

« Je (Dieu) leur donnai aussi des préceptes qui n’étaient pas bons, et des ordonnances par lesquelles ils ne pouvaient vivre. » (Ezéchiel 20,25.)

« Moïse, dirent-ils, a permis d’écrire une lettre de divorce et de répudier. Et Jésus leur dit : C’est à cause de la dureté de votre cœur que Moïse vous a donné ce précepte. » (Marc 10,4-5.) Selon l’auteur, la combinaison de ces deux textes de sources juive et chrétienne vient accréditer l’idée que certaines lois, bien qu’inscrites dans la Torah, ne seraient pas parfaites, mais simplement adaptées aux capacités de réception des peuples auxquels elles furent destinées.

Coran 2v106 : « Chaque fois que Nous abrogeons un verset (« nansakh ») ou que Nous le retardons (ou faisons oublier), Nous en apportons un meilleur ou un semblable… »

Ce verset, selon Mahmoud Mohamed Taha, permettrait de réactiver des versets mecquois plus spirituels qui selon lui n’auraient pas été abrogés, mais suspendus, le temps pour l’humanité d’acquérir les capacités de réception de ces versets, considérés par l’orthodoxie sunnite comme abrogés par des versets médinois plus sévères.

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